Point d’étape du Grenelle des violences conjugales

Les acteurs du « Grenelle des violences conjugales » étaient réunis mardi 10 mai, à la CPS (Communauté du Pacifique).

Trois ans après le Grenelle des violences conjugales, qui a permis d’initier une véritable dynamique en Nouvelle-Calédonie, le gouvernement et le Haut-commissariat de la République ont organisé conjointement le troisième comité de suivi du Grenelle, mardi 10 mai, à Nouméa. L’occasion de dresser le bilan des actions déjà engagées et de celles encore à venir.

« En Nouvelle-Calédonie plus qu’ailleurs, le phénomène des violences conjugales est très prégnant », a lancé le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, Patrice Faure, en ouverture de ce troisième comité de suivi qui réunissait l’ensemble des institutions et des partenaires. Effectivement : chaque année 5,4 personnes sur mille sont victimes de violences intrafamiliales, dont 90 % de femmes. Cela représente un score deux fois plus élevé qu'en Métropole. Malgré les nombreuses solutions mises en place depuis trois ans, le bilan du procureur de la République en Nouvelle-Calédonie, Yves Dupas, est édifiant. « Depuis 2018, on constate une hausse de près de 20 % des dépôts de plainte pour violences conjugales. » Une situation qui ne s’explique pas forcément par une recrudescence des cas, mais plutôt par l’action de la politique de lutte et la libération de la parole, selon le chef du parquet « Cela est le signe que la parole se libère, et que les victimes osent enfin franchir la porte d’un commissariat de police. » 

Éviction du conjoint violent 

« Grille d’évaluation danger », garde à vue quasi systématique, perquisition afin de saisir les armes à feu, éviction du conjoint violent pour préserver la situation de la victime et des enfants… Depuis deux ans, les différents moyens de formation et de prise en charge mis à disposition des forces de l'ordre par l'État se sont intensifiés. Toutefois, les victimes se tournent encore tardivement vers la justice. « Je le redis ici, le dépôt de plainte n’est pas nécessaire pour engager une enquête. Il suffit de signaler les faits en cas de violences ou si l'on constate dans son entourage une personne qui est victime de violences. », a rappelé Yves Dupas. D’ici peu, les structures médicales et les dispensaires pourront également recevoir les dépôts de plaintes afin de faciliter les démarches des victimes. Et au palais de justice, les faits dénoncés donnent lieu à procédures pénales mais également à la prise en charge des auteurs de ces violences, afin d’entamer un long suivi de prise de conscience et de déconstruction du comportement violent.

« La violence ne doit pas être traitée de façon isolée »

Pour Isabelle Champmoreau, vice-présidente du gouvernement chargée notamment de la lutte contre les violences intrafamiliales, « la violence ne doit pas être traitée de façon isolée, car elle est étroitement liée aux questions d’égalité des genres, à l’éducation à la parentalité. » Dans ce sens, elle a annoncé l’organisation prochaine d’un séminaire sur la protection des enfants, dès les mille premiers jours, quand ils sont victimes et/ou témoins de violences. Cette thématique a d’ailleurs été identifiée comme la priorité des travaux du prochain comité de suivi du Grenelle. Pour conclure, Patrice Faure a souligné l'importance d’ « une prise de conscience collective des citoyens, élus et agents de l’État. La lutte contre les violences conjugales est un travail résolument collectif. » 
Un film rétrospectif du gouvernement, retraçant les principales actions concrètes menées par l’ensemble des partenaires institutionnels depuis le grenelle de 2019, et  un court-métrage de sensibilisation, primé par le ministère des outre-mer, ont également permis de prendre la mesure de la mobilisation de tous les acteurs de la Nouvelle-Calédonie.

Isabelle Champmoreau, vice-présidente du gouvernement chargée notamment de la lutte contre les violences intrafamiliales et le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, Patrice Faure.

 

 

Enquête « Cadre de vie et sécurité »

L’Institut de la statistique et des études économiques (Isee) a livré un premier aperçu de son enquête spécifique intitulée « Violences intrafamiliales en Nouvelle-Calédonie : de nombreux faits rarement signalée ». À partir d’un échantillon de 6 000 foyers calédoniens, elle révèle les conditions de vie et de sécurité entre février et septembre 2021. Commanditée en partie par le gouvernement, elle dresse un état des lieux des violences vécues par les Calédoniens dans leur quotidien (atteintes aux biens et aux personnes) sur des actes s'étalant sur la période 2019-2020. 
Ainsi en 2021, 45 000 Calédoniens se déclarent « souvent » ou « de temps en temps » en insécurité dans leur quartier, leur village ou leur tribu. Ce chiffre représente 21 % de la population. Il est deux fois plus élevé que le score relevé en Métropole. D’autre part, le sentiment d'insécurité est davantage ressenti par les femmes : il concerne près d'une Calédonienne sur trois. 23 % des femmes se déclarent par ailleurs en insécurité à leur domicile. Ce chiffre est à rapprocher des données sur les violences intrafamiliales. Les femmes représentent 70 % des victimes majeures de violences physiques ou sexuelles au sein du ménage, selon les déclarations recueillies par l'ISEE.

Yves Dupas, procureur de la République en Nouvelle-Calédonie et Olivier Fagnot, directeur de l’Isee NC, ont dressé chacun un bilan de ces deux dernières années.

 

 

Le Grenelle contre les violences conjugales 

 

Impulsé par le Premier ministre Édouard Philippe, le 3 septembre 2019, le Grenelle contre les violences conjugales a été décliné sur l’ensemble du territoire de la République et notamment en Nouvelle-Calédonie.

Cette démarche, qui mobilise l’ensemble des acteurs concernés, a permis de fixer des orientations et des engagements concrets et collectifs pour lutter contre les violences conjugales. Élus, forces de l’ordre, représentants des institutions judicaires et éducatives et associations du territoire…, contribuent aux travaux de ce Grenelle organisés sous la forme d’ateliers thématiques (protection des femmes victimes de violences, parcours de la victime, prévention et gouvernance).

À l’issue de ces rencontres, 90 pistes d’amélioration ont été identifiées et un comité de suivi annuel a été instauré afin d’analyser l’avancée des projets. 

 

Le premier site internet dédié aux violences sexuelles et sexistes : https://violences-conjugales.gouv.nc/

Ce site était l’un des engagements du gouvernement lors du Grenelle contre les violences conjugales. Inauguré le 25 novembre 2021, il est dédié à l’information des personnes victimes ou témoins de violences sexuelles et sexistes. Il comprend des informations pratiques, accessibles à toutes et tous.